La Place dArmes
Extrait du plan de Blida de 1852 SOUVENIRS BLIDEENS xv La Place Clemenceau, autrefois Dans le premier chapitre de ces souvenirs, j’ai narré l’histoire du bassin de la Place d’Armes qui fut l'objet, en 1847, de dissensions burlesques entre lles autorités civiles et militaires, ce qui amena le transfert à Alger du siège de la Division ; nous ferons aujourd’hui le tour de cette jolie place qui portera, dorénavant, le nom de Clemenceau. L'Hôtel de ville actuel a été construit sur des terrains qui étaient occupés par de vastes fondouks (remises indigènes), entourés de petites boutiques d’artisans, ils s’étendaient jusqu’à la rue d’Alger où se trouvent aujourd'hui l'Hôtel des postes et le Crédit Foncier d’Algérie et de Tunisie. C'est dans l’immeuble de la Poste que fut installée par le regretté M. Mauguin sa première imprimerie ; le Tell lui y fondé par lui en 1863. Nous rappellerons que M. Mauguin, grand bienfaiteur de Blida, en fut le maire pendant plus d’un quart de siècle, président du Conseil général, député et plus tard sénateur d’Alger. Blida lui dut un grand élan dans sa prospérité, dans son charme et sa beauté. Avant la construction de la mairie actuelle, cette dernière était installée dans l'immeuble à balcons qui se trouve à l’angle de la rue d’Alger et de celle du Bey. Lors de son transfert où elle se trouve aujourd’hui, ses locaux furent affectés à l’école communal dirigée par M. Caze- nave, maître d’école, qui a laissé un souvenir inoubliable dans les familles blidéennes. Cette école, nous l’avons vu, avait été primitivement installée à côté de l’ancienne Eglise, sur l’emplacement occupé aujourd’hui par les Galeries de France. Elle fonctionne aujourd’hui dans la rue Denfert-Rochereau, où elle est encore connue sous le nom d’École Cazenave ; elle se trouve dans des conditions les plus déplorables, et depuis longtemps, hélas ! aux points de vue hygiène et moral — en face du quartier réservé — son déplacement est heureusement envisagé à brève échéance. Les terrains sur lesquels se trouve aujourd’hui l'importante imprimerie-librairie Mauguin (M. Bullinger, successeur), servaient au moment de l’occupation, de marché arabe aux huiles, aux grains, etc. A leur aliénation, un immeuble y fut construit ; il appartenait à M. Almaric, propriétaire, banquier, conseiller municipal et administrateur du bureau de bienfaisance, Il abrita longtemps le Café-Brasserie du Commerce, puis le Tribunal civil. Le local où se trouve la fonderie de l’Imprimerie et qui donne sur une courette, servait de geôle ; on y enfermait les condamnés à mort. Le marché arabe précité avait été transféré dans un grand fondouk qui servit plus tard de halle aux tabacs ; c’est sur ces terrains que fut construite la belle et utile école arabe-française d’apprentissage de la rue Tirman, lorsque la halle aux tabacs du boulevard Bonnier fut édifiée. Nous avons déjà, au chapitre 1, indiqué que l'Hôtel d’Orient actuel était occupé par les bureaux de la Division d’Alger, dont le dernier commandant fut le général Yusuf. L'immeuble occupé par le Syndicat d’initiative, à l’angle de la rue de Gueydon et de la rue Lamy, a longtemps servi de local à la Justice de paix ; malgré l'exiguïté des locaux, cet important service judiciaire y était mieux placé que dans le taudis qu'il occupe aujourd’hui, près du marché indigène ; il est à souhaiter qu'une justice de paix digne de Blida soit bientôt édifiée ailleurs. Comme nous l’avons vu, le bel immeuble des Galeries de France. ancienne maison Flandrin, a été construit sur les terrains de l’Ecole Dordor et Cazenave. Une partie du rez-de-chaussée est occupée par le Grand Café Glacier, tenu par Arlandis, et qui le fut longtemps par Clotar. L’angle de ce café, du côté de la rue Ben Kedda prolongée, a été longtemps affecté comme salle de réunion des officiers, Blida n’ayant pas de cercle militaire. Une cloison mobile séparait cette petite salle de la grande, qui sert maintenant de prolongement aux magasins des Galeries de France. Aujourd’hui les officiers sont admis au Cercle civil. En continuant le tour de la Place nous rappellerons que la première église catholique de Blida avait été installée en 1840 dans une mosquée désaffectée qui, depuis le 18 novembre 1838 — occupation Clauzel - servait d’hôpital et de magasins militaires. Cette mosquée, qui se trouvait sur remplacement de l’immeuble Lauro (Brasserie Maxeville ), avait sa façade de guingois afin d’être orientée vers l’Est, direction des Lieux Saints de l'Islam. Plus loin, sur l’emplacement de l’ancien 2ie Conseil de guerre — le 1er était à Alger — où se trouvent aujourd’hui le logement du commandant d’Armes, les bureaux de la Place, les magasins du 1" Tirailleurs, etc, avait été édifié, en 1840. le premier hôpital militaire : la rue qui le longeait au Nord-Ouest, où stationnent les voitures publiques, était dénommée rue de l’Hôpital ; elle se nomme aujourd’hui Capitaine Ihler, en souvenir d'un charmant officier du 1"’ Chasseurs d'Afrique, très estimé de nos concitoyens, qui fut tué au Maroc, dans les premiers combats qui suivirent le débarquement. Près de l’Hôpital, rue Clauzel, a habité Fromentin, le grand peintre et littérateur, qui a été un des premiers à couvrir de louanges la Ville des Poses dans son ouvrage : « Un an dans le Sahel », il est à remarquer qu'aucune rue de Blida ne porte son nom ? Ne devrait-il pas être donné à la rue Ben-Kedda prolongée, près de la Brasserie Maxeville?
Commandant ROCAS.
Le Tell du 16/07/1930
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