SOUVENIRS BLIDEENS 

 

La Bassin de la Place d'Armes 

 

Ce bassin au-dessus duquel a été édifié le coquet kiosque à musique a une histoire que nous allons narrer : C'était en 1847 ; Blida possédait le siège de la Division d’Alger dont le commandant était le Général Yousouf. Les bureaux de la Division étaient dans l’immeuble occupé aujourd'hui par l'Hôtel d'Orient et la demeure personnelle du général se trouvait dans une villa située dans les jardins de M. Dulioust, minotier, et plus tard, propriété de son gendre, M. Zill des Isles, conseiller à la Cour d’Appel ; ces jardins étaient placés entre la cité actuelle Gauthier et l'entrée sud des Ouled-Soltan. L'Hôtel d'Orient, sous ce même nom, était logé dans la rue d Alger dans la maison à balcons qui fait face au magasin de cycles de Remadni. Dans le bas de la Place d'Armes, une mosquée désaffectée et qui servait d'église au culte catholique, occupait l'emplacement où ce trouve l’immeuble de la Brasserie Maxeville. L’hôpital militaire était tout à côté, sur le terrain  a été édifié le conseil de guerre et qui est occupé aujourd'hui par les magasins du 1" Tirailleurs et les bureaux de la Sous-Intendance militaire. La Place d’Armes, qui s’étendait devant la Division et devant I'Eglise, servait, à certaines heures, de terrain de jeu de paume aux officiers de la garnison : le « foot-ball » de cette époque. Il faut noter qu'en ce temps-là, l'autorité militaire, qui avait en mains l'administration de la colonie, était toute puissante ; les dures épreuves de la conquête avaient quelque peu faussé l’esprit des officiers qui agissaient par trop en conquérants avec, en plus, chez certains d’entre eux, un manifeste dédain envers l’élément civil. C'est donc par suite de cette fâcheuse mentalité, bien inconnue des officiers de nos jours, que l'autorité militaire, afin de permettre aux officiers de se livrer au jeu de la balle sans aucune gâne, faisait placer des sentinelles sur la place à chaque débouché de rue, avec la consigne d’interdire à quiconque de passer sur la place. La population en était contrariée et génée dans ses moyens de circulation. La municipalité décida le creusement d'un bassin au beau milieu de la place ; ’c'était une façon élégante de forcer les officiers à chercher ailleurs un emplacement pour leur jeu. Les ouvrier» se mirent donc à l’œuvre, ie bassin fut creusé, mais dans la nuit, sur un ordre du Général Yousouf. des corvées militaires le recomblèrent Le maire, M. Lemoine, crut à une brimade éphémère et sans plus s’émouvoir, fit remettre ses ouvriers au travail ; ils recreusèrent le bassin, mais dans la nuit il fut une seconde foie recomblé. M. Lemoine n’essaya pas une troisième tentative et il se rendit à Alger pour présenter au Gouverneur Général, au sujet de cette brimade, les doléances de son conseil. Le duc d’Aumale, qui était alors Gouverneur Général de l Algérie, pour couper court à tout, décida le transfert à Alger du siège de la Divieion et c’est ainsi que la malencontreuse histoire de ce bassin priva la ville de Blida d’un service important et avantageux pour elle.

 

Commandant Rocas.

 Le TELL 27/04/1927